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La mare sans poisson Témoignage de François (Liège - Belgique)
Interview réalisée par Yves Wouters
Qui êtes-vous ? D'où venez-vous ? Que faites-vous dans la vie ?
J’ai 44 ans, je suis marié et père de 2 fils (17 ans et 12 ans). Je vis en Belgique en région liégeoise. Je suis ingénieur en aérospatial et je suis responsable de la production et de la supply chain d’une société travaillant dans le domaine de l’aéronautique.
Etes-vous un passionné de bassins de jardin ou plutôt de nature en général ou les deux ?
Je dirais les 2, je suis membre de Natagora depuis des années et je m’intéresse beaucoup à la vie sauvage de nos régions. Je me suis intéressé aux bassins il y a 2 ans environ après avoir visité une mare dans un jardin à liège à la sortie de l’hiver (fin février). En effet, j’ai eu la surprise de voir une cinquantaine de grenouilles rousses dans une mare de quelques mètres carrés. C’était très impressionnant et cela m’a donné envie d’avoir une mare dans mon jardin.
Comment vous est venue l'idée de réaliser une mare sans poisson ?
Lorsque ma mare a été terminée, j’ai hésité à placer quelques poissons. Le jardinier qui m’avait montré la mare avec les grenouilles m’avait dit qu’entre les poissons et une vie sauvage complète et diversifiée il fallait choisir. J’ai choisi la vie sauvage plutôt que les poissons qui tournent dans un petit bassin.
Pouvez-vous décrire votre mare et depuis quand existe-elle ?
La mare est à sa seconde année. Elle est d’aspect naturel et créée sur une bâche en EPDM. Sa forme est irrégulière et elle fait une quinzaine de mètres carrés.
Après un an.
Seconde année
La mare comporte des zones de différentes profondeurs (de quelques cm à 1m). Il n’y a pas de filtration mais une cascade avec une lampe UV.
La bâche est cachée par des galets et des plantes.
Au niveau des plantations, j’ai un nénuphar nain au milieu du bassin, des plantes oxygénantes un peu partout, des iris et des aloès d’eau (stratiotes aloides).
Ces 2 dernières plantes se marient particulièrement bien car l’aloès est une plante flottante qui remonte à la surface au printemps et a un feuillage ressemblant à celui de l’iris.
Qu'avez-vous pu observer jusqu'à présent ?
Énormément de choses et dès les premières semaines !
La première année, agrions et libellules qui pondent, dytiques de différentes espèces, notonectes (en fin de saison), une vingtaine d’espèces d’oiseaux qui se lavent et se désaltèrent, des grenouilles rousses et des tritons alpestres et palmés ainsi que leurs progénitures (têtards et larves de tritons en fin de saison).
Vous pouvez vous installer un quart d’heure au bord de l’eau et voir une bonne partie des animaux que j’ai listés.
Le héron est aussi venu quelque fois mais je ne sais pas s’il a réussi à attraper quelque chose.
La seconde année, la végétation s’est fortement développée dans et autour du bassin. Ceci offre plus de cachettes aux animaux et rend l’observation encore plus agréable. Les larves d’agrions commencent à sortir de l’eau et on peut en voir autour du bassin dès les premiers rayons de soleil.
Les larves de libellules sont beaucoup plus grosses et toujours dans le bassin à ce stade. Elles sortiront d’ici peu.
Quelle est votre plus importante et émouvante découverte autour de votre plan d'eau ?
Toutes les observations sont intéressantes, j’aime particulièrement celles des batraciens et des libellules. Les premières grenouillettes qui sortent du bassin m’ont particulièrement intéressé, j’espère qu’elles reviendront au stade adulte.
Avez-vous observé une faune plus importante dans votre jardin depuis la création du plan d'eau ?
Sans aucun doute la faune est beaucoup plus importante depuis l’installation du bassin naturel sans poisson.
J’habite en milieu urbain et je voyais des mésanges, quelques moineaux et merles et c’était à peu près tout.
Maintenant, j’ai compté 23 espèces d’oiseaux différentes, des insectes aquatiques, des libellules (jamais vu en dix années auparavant), des grenouilles, tritons,...
Il faut reconnaître aussi que je regarde beaucoup plus ce qui se passe dans le jardin depuis l’installation du bassin qui est juste en face de mon salon (avec une paire de jumelle je vois beaucoup de choses). Une observation de nuit avec une lampe de poche montre encore beaucoup d’autres choses.
Envisagez-vous un agrandissement de la mare dans un futur proche ?
Pas actuellement. J’ai un jardin limité en zone urbaine. Peut-être un petit ruisseau mais rien de concret à ce stade.
Pour terminer, quel message voulez-vous faire passer aux passionnés de l'aquatique ?
Mon message est le suivant :
L’absence de poisson signifie plus de nature, plus de diversité, plus d’observations, plus de plaisir pour les enfants et pour les adultes.
Chez mes parents se trouvait une mare avec des kois et des graviers et c’est tout.
Rien ne survivait car les poissons mangeaient tout.
Ils ont profité d’une vidange accidentelle du bassin pour se séparer des kois et depuis ils redécouvrent le bassin. Les têtards, libellules, tritons sont apparus et le bassin est devenu très attractif pour tout le monde.
Les poissons sont de trop efficaces prédateurs, en grand nombre dans un espace limité d’un bassin ils font un carnage sur toute la faune. Ne pas en avoir du tout me semble la meilleure option.
D’autres solutions peuvent exister et j’en ai discuté avec d’autres membres du forum aquajardin. Je citerais un grand bassin avec de nombreuses cachettes pour la faune (rochers, galets), bassin coupé en 2 avec une zone sans poisson, lagunage surélevé sans poisson et réservé aux batraciens, à leur ponte, leurs têtards et larves.
Merci François pour ce beau témoignage et longue vie à votre mare !
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