L'anatomie de la carpe koï
Auteur : Philippe de Vries
Chapitre I : Partie externe
(suite et fin)
Selon les différentes espèces de poisson, la forme, la position, la constitution de la bouche est adaptée à la recherche et à l’exploitation de la nourriture propre à chaque espèce. Elle peut être conformée pour sucer, engloutir, pincer, gober, saisir, broyer ou même estoquer.
Pour la carpe koï, la présence d’un petit os (le kinéthmoide) permet à la bouche de la carpe d’être protractile : ce qui veut dire que ses lèvres avancent, ce qui lui permet de ramasser les plus gros aliments.
Bouche protractile en action
En fonction de leur environnement (fond du bassin et sources de nourriture disponibles), les carpes pourront avoir soit des lèvres très dures, soit au contraire des bouches moins charnues et plus fragiles (il faudrait en tenir compte pour le choix de nourriture à donner lors de la distribution).
Pour la nourriture plus fine, elles aspirent un volume d’eau puis font le tri en recrachant les composants indésirables (sable, gravier …).
On dit aussi que les carpes peuvent (peigner) l’eau avec leurs branchiospines et en extraire les grandes formes de zooplancton (2 mm et plus).
La carpe koï a-t-elle des dents ?
Oui, mais pas dans la bouche !
La carpe koï possède des dents au niveau du pharynx, on les nomme des dents pharyngiennes.
Forme de l’ossature de la mâchoire avec des dents
Se trouvant dans le gosier, ces dents sont utilisées pour moudre très finement la nourriture.
Les dents ressemblent à des molaires et permettent de broyer les aliments les plus durs contre une cornée appelée « meule » ou « plaque masticatrice » placée en face vers le haut. Elles sont régulièrement renouvelées et il n’est pas rare d’en voir au fond d’un bassin.
Des études scientifiques ont démontré qu’a titre de comparaison, et pour relativiser la dureté d’une nourriture, une mâchoire humaine est sept fois moins puissante (une dizaine de kilos au cm²).
Os de la mâchoire supportant les dents
Conclusions
Les aliments sont saisis à l’aide de la bouche par succion ou aspiration (plus ou moins 40 cm/s), les particules sédimentaires, organiques, minérales et/ou alimentaires se retrouvent dans l’appareil bucco pharyngé qui sépare et trie les parties nutritives.
Les particules sont regroupées, interviennent ensuite une trituration puis une mastication efficace par les dents pharyngiennes et enfin un tri au niveau des branchiospines et rejet du matériel non consommable (en particulier minéral) par les ouvertures operculaires.
Petite info :
Il arrive d’apercevoir des carpes koï dégurgiter pendant une certaine période leur nourriture. La cause peut en être le changement de dents du
gosier.
Véritable appareil respiratoire, les branchies ont deux rôles bien à eux :
Premier rôle
Les branchies permettent d’absorber l’oxygène (O2) dissous dans l’eau et de rejeter le dioxyde de carbone (CO2).
Formées de 4 arcs branchiaux, elles présentent une importante surface de tissus favorisant les échanges gazeux. Les filaments des branchies rentrent en contact avec l’eau, absorbent l’oxygène, transmettent l’oxygène aux tissus qui à
leur tour transmettent aux vaisseaux sanguins.
Le sang et l’eau sont quasiment en contact direct, car seule une couche des cellules épithéliales les sépare. Cette couche est très fine (un micron ou 1 µm = 1/1000 millimètre donc 1000 µm = 1mm).
L’eau rentrant par la bouche est expulsée à travers les branchies, les filaments branchiaux jouent le rôle de filtre et retiennent l’oxygène pour l’absorber.
Le sang traverse les branchies ( plus scientifiquement les lamelles branchiales) dans le sens opposé au flux de l’eau. En circulant une fois à travers les lamelles, les globules rouges sont étirés afin d’augmenter leur surface. Ensuite, ils absorbent l’oxygène et le transportent à tout l’organisme.
Le sang circulant dans l’organisme se décharge de l’oxygène et récupère le gaz carbonique pour extraire celui-ci par les branchies.
Donc en résumé, pendant le passage de l’eau à travers les branchies, les lamelles branchiales s’emparent d’une partie de l’oxygène qui est contenue en dissolution et lui rendent , en échange une quantité équivalente de gaz carbonique, le cycle est complet.
Les branchies sont fragiles et donc il est très important de maintenir nos carpes koï dans un élément liquide sain et bien équilibré.
En cas de problème, la couleur des branchies peut nous indiquer plus ou moins ce qui se passe :
- des branchies saines ont la couleur rouge brillant
- des branchies brunâtres et décolorées nous indiques qu’il y a probablement une asphyxie nitrique
- des branchies blêmes nous démontrent une anémie probable
- des branchies présentant des glaires pâteux ou une muqueuse sur les extrémités nous indiquent qu’il y a probablement une infection parasitaire, une mauvaise qualité de l’eau et/ou une détérioration de l’eau par des médicaments.
Deuxième rôle
Les branchies interviennent aussi dans l’osmorégulation du poisson.
L’osmorégulation, c’est le procédé du maintien du taux eau/sel et excrétion.
Les poissons ont besoin d’une quantité de sel dans leur organisme et tissus, le sel se trouvant dans l’eau est absorbé par les tissus, d’où une quantité d’eau rentre dans l’organisme et ainsi alimente l’organisme du poisson en sel (ce sont des sels minéraux et non du chlorure de sodium).
Comme la concentration des sels est plus importante dans les tissus et les liquides physiologiques que dans le milieu aquatique ambiant, les branchies ont tendance à absorber l’eau et à rejeter les sels (ce processus s’appelle osmose et diffusion).
L’excédent d’eau absorbé par les branchies est excrété par les reins sous forme d’une urine fortement diluée. Ensuite les cellules branchiales recommencent à prélever les sels de l’eau afin d’équilibrer la concentration de sels dans les tissus et les liquides physiologiques.
L’excrétion de l’ammoniaque va de paire avec la respiration, il y a plus ou moins 75% d’ammoniaque qui sont dégagés par les branchies, le reste dans une urine diluée.
Par ce procédé complexe, il faut comprendre que les poissons d’eau douce doivent dès lors tout le temps dégager de l’eau par le canal des reins et des branchies. Si des problèmes se déclarent à ces endroits, les poissons ne parviendront plus à dégager suffisamment d’eau et donc il y aura une tuméfaction du ventre (grossissement du ventre), et des yeux, ce qui se traduira en ascite pour le ventre et exophtalmie pour les yeux.
Voila une raison principale, en présence d’ascite et/ou exophtalmie, de placer le sujet malade en bac de quarantaine avec du sel.
En effet, une concentration de sel fera retirer l’eau du poisson et fera diminuer les tuméfactions. Les branchies et les reins seront soulagés temporairement.
Les branchies sont renfermées dans une cavité de la tête, recouverte par des battants faisant en quelque sorte office de soupapes et dénommés Opercules.
L’opercule est une grande plaque osseuse qui protège les branchies fragiles et mobiles. Les opercules agissent à la manière d’une valve antiretour qui veille à ce que l’eau viciée et désoxygénée puisse s’évacuer sans refluer dans les branchies.
L’operculimétrie, est une méthode mise au point en Grande Bretagne qui est fondée sur la lecture des zones observées sur les opercules, ainsi on peut calculer l’age du poisson.
Les zones claires correspondent à la croissance rapide d’alimentation abondante, et les zones sombres correspondent aux périodes de croissance lente où le poisson ne s’alimente pas ou peu (l’hiver).
Mâle,
femelle... qui est qui ? |
En règle générale, il faut que la carpe koï atteigne une taille supérieur à 20 cm – 25 cm pour reconnaître un mâle d’une femelle, en dessous, il n’a pas atteint la maturité sexuel et le diagnostic est difficile.
C’est normalement (sauf exception) durant les mois d’avril et de mai de la seconde année de vie, que la carpe koï commence à avoir un caractère sexuel bien distinct.
Vue d’en haut
A partir d’une taille 20 à 25 cm, les organes sexuels de la carpe commencent à se former. Les gonades (testicules pour le mâle et ovaires pour la femelle) se forment, le ventre de la femelle se relâche et s’arrondi tandis que le ventre du mâle s’amincit et se galbe tout en gardant un profil fuselé et de forme aérodynamique.
Le mâle a un museau plus fin que celui de la femelle.
Vue de face ou de coté
Quand le male est arrivé à sa maturité sexuelle, des bourgeons de reproduction apparaissent sur la tête, les opercules et les nageoires pectorales. Ces bourgeons se trouvent essentiellement le long des rayons des nageoires. Ils s’appellent également protubérances de frai, à ne pas confondre avec une infection d’ichtyophtiriose (points blancs).
Toutes ces protubérances ne servent que pour la période de reproduction où le mâle frotte sa tête et ses nageoires contre les flancs de la femelle pour l’inciter à pondre.
Pour reconnaître, il faut prendre la nageoire pectorale entre le pouce et l’index et frotter de haut en bas. Si au touché la sensation est lisse, il s’agit d’une femelle. Si elle est rugueuse, c’est un mâle.
Autre règle générale, les nageoires pectorales de la femelle sont plus fines, courtes et rondes
et les nageoires pectorales du mâle s’allongent en pointe.
Avec une vue de coté du ventre, on peut voir que l’orifice urogénital des femelles est en forme de T, et chez les mâles en forme de I.
Attention toutefois qu’il y a environ 4% a 6 % des carpes koï qui sont hermaphrodites et donc disposent aussi bien d’organes sexuels masculins que féminins et ne peuvent se reproduire sauf exceptionnellement.
La
taille de la carpe koï |
Dans de bonne condition, la carpe koï peut atteindre 70 à 75 cm, mais en général, la plupart des mâles ne dépassent pas 70 cm.
Seule exception, le grand koï du japon (de son nom chagoi et magoi) peut atteindre facilement 1 mètre.
D’autres exceptions dépendront en réalité de la ligne sanguine (c-à-d de des parents génétiques).
L’âge du poisson peut être déterminé en comptant les lignes de croissance dans les écailles (comme expliqué plus haut dans le paragraphe consacré aux écailles).
Ce sont principalement les très bonnes conditions dans lesquelles sont tenues les carpes koï qui permettent à certains spécimens d’atteindre 70 à 80 ans.
Un poisson rouge peut atteindre 25 ans s’il est également tenu dans d’excellentes conditions.
Chapitre II : Partie interne
La partie sur l’anatomie interne est plus complexe car les interactions entre les différents organes sont nombreuses.
Malgré la taille du poisson, il existe un grand nombre d’organes, tous aussi importants les uns que les autres. Dès lors, il sera peut-être difficile de tout évoquer ici
même.
La carpe koï possède un squelette complet et d’une importance capitale. On néglige souvent d’en parler.
Appartenant au groupe des téléostéens (poisson à squelette osseux, ce squelette est essentiel dans l’anatomie interne car il assure la fonction de soutien et la protection des organes délicats (le crâne entoure le cerveau et les yeux) et des tissus.
Ce squelette est formé du crâne, de la colonne vertébrale, des ceintures pectorale et pelvienne, des os associés aux nageoires impaires (dorsale, anal et caudale) et finalement des côtes protégeant l’abdomen.
Crâne : boîte osseuse renfermant le cerveau du poisson
Opercule : plaque osseuse paire recouvrant l’ouverture des branchies
Rayon de la nageoire dorsale : chaque petit os formant la nageoire avant située sur le dos du poisson
Cartilage radial : substance élastique relative au radius
Epine neurale : épine contenant une partie du système nerveux
Vertèbre : chacun des os formant l’épine neurale du poisson
Arc hypuraux : os auquel sont rattachés tous les rayons de la nageoire caudale
Rayon de la nageoire caudale : chaque petit os formant la nageoire extrême du poisson
Cote : chacun des os formant la cage thoracique
Clavicule : os de l’épaule pour le poisson en bas du crâne
Mâchoire inférieure : mandibule. Mâchoire supérieure : partie supérieur de la bouche
Orbite : cavité du crâne dans laquelle repose l’oeil
Par une série d’articulations, le squelette assure la mobilité et offre également des points d’ancrage à la musculature.
La colonne vertébrale constitue l’axe central du squelette, et c’est tout à fait normal que c’est sur cet axe central que viennent se greffer les principaux blocs musculaires qui donnent à la carpe koï la puissance et l’agilité qu’elle a besoin.
Le début de la colonne vertébrale joue un autre rôle important, c’est en quelque sorte l’oreille de la carpe car les sons qui se déplacent dans l’eau font vibrer la vessie natatoire. Les osselets amplifient ces vibrations avant de les transmettre aux cellules sensorielles de la vésicule de l’oreille interne.
Petite info :
Scientifiquement, on a pu déterminer que les poissons possèdent un plus grand nombre d’os que les autres vertébrés. Par exemple, le crâne humain renferme 28 os, le crâne de la carpe koï en possède trois fois plus.
Appelé Appareil de
Weber, c’est un ensemble de 3 ou 4 petits os qui mettent en relation la vessie natatoire avec l’oreille interne. L’appareil de Weber transmet les variations de pression et les vibrations à l’oreille interne, ce qui permet ainsi au poisson de maintenir son équilibre en vidant ou en remplissant la vessie natatoire.
En fait, une partie de l’oreille des poissons est enfermée dans la tête et n’a pas d’orifice externe, d’où ils n’ont pas besoin de pavillons comme chez l’homme.
Les vibrassions ébranlent une masse de tissus gélatineux et des cils sensoriels souples et flexibles comme ceux de la ligne latérale. La vessie natatoire est reliée à l’oreille interne qui a comme similitude avec l’homme que la vessie natatoire remplit le même rôle que le tympan chez nous les humains.
Nous pouvons donc par ces points dire que la carpe koï, comme beaucoup d’autres poissons, entend bien.
Petite info :
D’après plusieurs scientifiques, les poissons possédant cet équipement ont une acuité auditive supérieure et sont capables de produire des sons.
N'hésitez
pas
à
communiquer
vos
découvertes
et
expériences
via
le
forum
ou
en
contactant
l'équipe
Aquajardin.
|