Jardin chinois dans le 74 : les concepts
Posté : mar. 10 oct. 2006, 23:47
Bonjour,
Comme expliqué brièvement dans la première intervention (Jardin chinois dans le 74, un projet), la création d’un jardin chinois est une démarche non seulement technique (jardinage, paysagisme, etc.), mais aussi intellectuelle, artistique et philosophique. On pourrait dire qu’elle est plus proche de la peinture et de la poésie (chinoises) que de l’architecture et du jardinage.
Le petit plan que j’ai imaginé et que je présente ci-dessous (disons que c’est un premier brouillon) est donc dans cette veine. Que le lecteur ne se laisse pas rebuter par les concepts et le vocabulaire typiquement chinois. Le mieux est de se laisser aller à la lecture et d’absorber, comme on déguste un plat dont on ne connaît pas les ingrédients. Petit à petit les saveurs étranges titillent le palais, excitent sa curiosité et l’imprègnent de ce qui est d’abord expérience nouvelle et devient plus tard souvenir, re-connaissance et connaissance, pour se muer éventuellement en ... appréciation.
Un jardin chinois doit donc refléter l’univers. La notion est relative : il s’agit de l’univers tel qu’il est perçu par le créateur. Voilà qui nous facilite bien des choses. On pourrait concevoir que l’univers est carré, car déterminé par les quatre directions : le nord, l’est, le sud et l’ouest, dont le lieu de rencontre est le centre. Notre jardin chinois sera donc plus ou moins carré et divisé en cinq parties.
Il existe un système de correspondance dans l’ancienne philosophie chinoise qui permet de comprendre la relation mutuelle de tous les composants de l’univers, tout comme leur mutation continuelle. C’est un guide important pour le créateur de jardins d’inspiration taoïste. Le plan du jardin permettra de comprendre cela aisément.
Ce jardin chinois se subdivise donc en cinq parties : une partie orientale, qui appartient au printemps : c’est une énergie jeune et vivace, qu’on compare volontiers à celle du jeune plant qui germe et s’élance vers le ciel dans sa première croissance. Son énergie dominante est le vent. La partie méridionale appartient à l’été. C’est le maximum de la croissance, de la chaleur, de la lumière. Son énergie dominante est le feu. L’occident marque le coucher du soleil et l’automne. Les sucs des plantes retournent à leurs racines. C’est aussi le moment des récoltes. Voilà donc le début de la décroissance. L’énergie dominante est la sécheresse. Le nord, c’est l’hiver et le froid, le maximum de la décroissance. Le monde se fige. La vie se cache dans les profondeurs de la terre et de l’eau. Comme attendu, son énergie dominante est le froid. La cinquième partie est le centre : c’est non seulement l’endroit où tous les phénomènes trouvent leur début et leur fin, d’où tout part et où tout revient, mais c’est aussi l’axe autour duquel tournent les quatre directions, tout en participant à leur mouvement. Ainsi, comme nous retrouvons un peu de chaque direction dans le centre, nous retrouvons un peu du centre dans chaque direction. Cette relation mutuelle et ces correspondances se traduisent tout autant en termes de formes que de mouvement, de couleurs, de structures, etc..
Pardon, mille pardons pour ces élucubrations philosophiques, que j’ai simplifié au maximum. Mais il s’agit d’une sorte de système cybernétique de perception et d’explication de l’univers, qui se traduira d’une façon bien concrète dans la réalisation des différentes parties du jardin. J’y reviendrai donc systématiquement.
Chaque partie du jardin a sa montagne : à l’est la Montagne du Bouddha, au sud, la Montagne des bambous, à l’ouest la Montagne des plantes médicinales, au nord la Montagne des pierres et au centre la Montagne de l’Eau. Chaque montagne a son arbre et sa symbolique fondamentale : le Bouddha à l’est évoque l’éveil et porte un pin (pinus sylvestris) ; au sud le bosquet de bambous offre sa fraîcheur en période de canicule (je reparle plus tard des bambous) ; à l’ouest plusieurs arbres, buissons et herbes contribuent par leur richesse au maintien du bien-être, représenté notamment par la pivoine arborescente (paeonia suffruticosa) - (je détaillerai aussi) ; au nord le prunier (prunus ume) apportera sa floraison en fin d’hiver, promesse du printemps. Au centre, il n’y a pas d’arbre. C’est le territoire de l’eau, début et fin de toutes choses. C’est de son échange avec le feu du soleil que naît la terre nourricière et les mille êtres.
Chaque partie du jardin-univers représente à son tour l’univers. C’est la matérialisation du concept que chaque microcosme représente le macrocosme, créant ainsi des subdivisions à l’infini et illustrant la richesse incalculable de la nature.
Je reparlerai plus tard de chaque partie du jardin et illustrerai un autre aspect important de la construction organique et dynamique du jardin chinois, qui tient dans la théorie de yin yang.
Zhangji
P.S. Jouxtant le jardin chinois, décrit ci-dessus, il y a un deuxième jardin, d'inspiration chinoise lui aussi : c'est le potager qui s'étend sur une pente en terrasses (en concstruction), comme les champs de riz ou de thé dans le sud de la Chine. Nous y cultivons déjà bon nombre de légumes chinois. Je vais visiter ces terrasses dans quelques semaines sur place pour étudier leur conformation, les techniques de retenue de terre et d'irrigation. J'espère d'ailleurs ramener une roue à aube typique ... Mais je parlerai moins de ce jardin, car en-dehors de son irrigation, son approche est plus lointaine du jardin aquatique.
Comme expliqué brièvement dans la première intervention (Jardin chinois dans le 74, un projet), la création d’un jardin chinois est une démarche non seulement technique (jardinage, paysagisme, etc.), mais aussi intellectuelle, artistique et philosophique. On pourrait dire qu’elle est plus proche de la peinture et de la poésie (chinoises) que de l’architecture et du jardinage.
Le petit plan que j’ai imaginé et que je présente ci-dessous (disons que c’est un premier brouillon) est donc dans cette veine. Que le lecteur ne se laisse pas rebuter par les concepts et le vocabulaire typiquement chinois. Le mieux est de se laisser aller à la lecture et d’absorber, comme on déguste un plat dont on ne connaît pas les ingrédients. Petit à petit les saveurs étranges titillent le palais, excitent sa curiosité et l’imprègnent de ce qui est d’abord expérience nouvelle et devient plus tard souvenir, re-connaissance et connaissance, pour se muer éventuellement en ... appréciation.
Un jardin chinois doit donc refléter l’univers. La notion est relative : il s’agit de l’univers tel qu’il est perçu par le créateur. Voilà qui nous facilite bien des choses. On pourrait concevoir que l’univers est carré, car déterminé par les quatre directions : le nord, l’est, le sud et l’ouest, dont le lieu de rencontre est le centre. Notre jardin chinois sera donc plus ou moins carré et divisé en cinq parties.
Il existe un système de correspondance dans l’ancienne philosophie chinoise qui permet de comprendre la relation mutuelle de tous les composants de l’univers, tout comme leur mutation continuelle. C’est un guide important pour le créateur de jardins d’inspiration taoïste. Le plan du jardin permettra de comprendre cela aisément.
Ce jardin chinois se subdivise donc en cinq parties : une partie orientale, qui appartient au printemps : c’est une énergie jeune et vivace, qu’on compare volontiers à celle du jeune plant qui germe et s’élance vers le ciel dans sa première croissance. Son énergie dominante est le vent. La partie méridionale appartient à l’été. C’est le maximum de la croissance, de la chaleur, de la lumière. Son énergie dominante est le feu. L’occident marque le coucher du soleil et l’automne. Les sucs des plantes retournent à leurs racines. C’est aussi le moment des récoltes. Voilà donc le début de la décroissance. L’énergie dominante est la sécheresse. Le nord, c’est l’hiver et le froid, le maximum de la décroissance. Le monde se fige. La vie se cache dans les profondeurs de la terre et de l’eau. Comme attendu, son énergie dominante est le froid. La cinquième partie est le centre : c’est non seulement l’endroit où tous les phénomènes trouvent leur début et leur fin, d’où tout part et où tout revient, mais c’est aussi l’axe autour duquel tournent les quatre directions, tout en participant à leur mouvement. Ainsi, comme nous retrouvons un peu de chaque direction dans le centre, nous retrouvons un peu du centre dans chaque direction. Cette relation mutuelle et ces correspondances se traduisent tout autant en termes de formes que de mouvement, de couleurs, de structures, etc..
Pardon, mille pardons pour ces élucubrations philosophiques, que j’ai simplifié au maximum. Mais il s’agit d’une sorte de système cybernétique de perception et d’explication de l’univers, qui se traduira d’une façon bien concrète dans la réalisation des différentes parties du jardin. J’y reviendrai donc systématiquement.
Chaque partie du jardin a sa montagne : à l’est la Montagne du Bouddha, au sud, la Montagne des bambous, à l’ouest la Montagne des plantes médicinales, au nord la Montagne des pierres et au centre la Montagne de l’Eau. Chaque montagne a son arbre et sa symbolique fondamentale : le Bouddha à l’est évoque l’éveil et porte un pin (pinus sylvestris) ; au sud le bosquet de bambous offre sa fraîcheur en période de canicule (je reparle plus tard des bambous) ; à l’ouest plusieurs arbres, buissons et herbes contribuent par leur richesse au maintien du bien-être, représenté notamment par la pivoine arborescente (paeonia suffruticosa) - (je détaillerai aussi) ; au nord le prunier (prunus ume) apportera sa floraison en fin d’hiver, promesse du printemps. Au centre, il n’y a pas d’arbre. C’est le territoire de l’eau, début et fin de toutes choses. C’est de son échange avec le feu du soleil que naît la terre nourricière et les mille êtres.
Chaque partie du jardin-univers représente à son tour l’univers. C’est la matérialisation du concept que chaque microcosme représente le macrocosme, créant ainsi des subdivisions à l’infini et illustrant la richesse incalculable de la nature.
Je reparlerai plus tard de chaque partie du jardin et illustrerai un autre aspect important de la construction organique et dynamique du jardin chinois, qui tient dans la théorie de yin yang.
Zhangji
P.S. Jouxtant le jardin chinois, décrit ci-dessus, il y a un deuxième jardin, d'inspiration chinoise lui aussi : c'est le potager qui s'étend sur une pente en terrasses (en concstruction), comme les champs de riz ou de thé dans le sud de la Chine. Nous y cultivons déjà bon nombre de légumes chinois. Je vais visiter ces terrasses dans quelques semaines sur place pour étudier leur conformation, les techniques de retenue de terre et d'irrigation. J'espère d'ailleurs ramener une roue à aube typique ... Mais je parlerai moins de ce jardin, car en-dehors de son irrigation, son approche est plus lointaine du jardin aquatique.