Mes ides ont un comportement assez particulier pour se nourrir : celui du chasseur. Ils ont deux sources d’alimentation : la vie nombreuse dans et à la surface de la mare. Un gros plouf de temps en temps et un mini tsunami m’apprennent qu’un de mes éternels affamés a fait un saut de « carpe » pour attraper un insecte trop lent se baladant à la surface de la mare ou au-dessus de celle-ci.
Avec ça, ils ont encore un repas quotidien, exactement vers 17.30 h, enfin dans ces eaux-là, car je ne vis pas avec un chrono implanté dans ma cervelle, malgré la proximité de la Suisse. De toute façon, ils sont prêts à toute heure et savent fichtrement bien faire la différence entre les aliments que je leur jette ou du petit gravier que j’avais envoyé sur l’eau, juste pour voir si …
Il faut savoir que mes ides sont là depuis une année, qu’ils ont passé un hiver rigoureux confortablement enfoncés au plus profond de la fosse (1,60 m) et qu’ils sont d’une prudence extrême : les visites du héron et des canards tapageurs, ça ne s’oublie pas. Faut-il en déduire que dans leur petit cerveau, il y aurait assez de place pour une mémoire ? J’ai par exemple constaté que dès qu’un oiseau passe en rase-mottes sur la mare, ils plongent à grande vitesse vers la sécurité des profondeurs. À peu près pareil quand je m’approche, même pour les nourrir. Il faut que je m’asseye et que je me tienne tranquille un moment avant qu’ils ne daignent refaire surface. Je ne sais pas l’âge qu’ils ont, mais déjà une taille de près de 20 cm. Il y en a six dorés et deux bleus, nombre que j’estime assez important pour cette mare de 50 m2.
Donc dès que j’ai jeté leurs granules dans la mare, ils entrent en action et affichent un comportement de requin. Accélération subite de la vitesse natatoire et formation de cercles concentriques autour du repas. Certains poussent la ressemblance jusqu’à venir tellement en surface que leur nageoire dorsale dépasse de l’eau. Puis vient l’approche. Pas toujours directe. Ils passent une ou deux fois sous l’aliment et puis s’approchent pour le gober. Si l’approche est toute en douceur, la prise est fulgurante et suivie immédiatement d’un plongeon accompagné d’un coup de queue spectaculaire. A chacun de ces coups, tous les autres ides plongent vers la profondeur, pour revenir aussitôt. Ainsi les attaques se multiplient, rapidement. On constate aussi les luttes d’influence pour s’approprier une croquette précise (même quand il y en a dix autres qui flottent juste à côté). Cette lutte a quelque chose d’humain. Ainsi ils attaquent parfois simultanément le même aliment : ce qui amène à un double coup de queue. J’ai essayé de le photographier de bien nombreuses fois. La vitesse est énorme. Même à une vitesse de 1/750, c’est difficile à avoir net (j’ajoute que la lumière n’est pas toujours propice non plus).
Voici donc quelques photos à l’occasion de leur repas ce soir à 19.30 (j’avais oublié l’heure d’été). Les images ont été tirées à grande vitesse (1/750), avec une grande ouverture (2.8), ce qui veut dire peu de profondeur et une haute sensibilité (1600), ce qui entraîne forcément du bruit dans l’image. Mais c’est le mieux que j’ai réussi à faire jusqu’à présent. J’ai encore beaucoup de progrès à faire en matière de photo. J’espère néanmoins que cela vous plaira.

La question est de savoir s'il va en prendre un seul ou les avaler tous d'un coup ...

La concurrence peut être rude. Ce bleu, ne dirait-on pas qu'il a tout du requin?

Ils se croisent et s'entrecroisent. Mais dans le bas, ne dirait-on pas notre gros balourd de sarasa?

Les points à la surface, ce sont les moustiques ... pour l'instant l'ide préfère les croquettes. Mais les premiers ne perdent rien pour attendre, surtout quand leurs oeufs donneront de moelleuses petites larves.

Et voilà un bleu argenté ...

Et voilà un doré qui n'a pas craint de frôler la berge pour s'offir le dessert.

Et pour terminer le formidable plouf de deux ides qui viennent de se faire peur l'un autre pour se saisir d'un granulé.
zhangji
P.S. J'attire l'attention du lecteur sur deux points :
- la clarté de l'eau de la mare, même qu'elle est à fond d'argile naturelle : ce qui récuse les déclarations qu'une mare à fond d'argile serait toujours trouble. Il n'y a aucune filtration. La recette est triple : apport d'eau en continu par des sources - mouvement continuel par une petite cascade et échange avec une autre mare qui fonctionne en quelque sorte comme lagunage - finalement une bonne plantation oxygénante.
- il a été possible de photographier les poissons sans trop de reflets de la surface d'eau par la combinaison d'un filtre UV + d'un filtre polarisant circulaire. Ca aide!